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3e LFR 2020 : une nouvelle exonération temporaire et sous conditions pour les dons familiaux en espèces

Les dons familiaux en espèces consentis jusqu’au 30 juin 2021 et affectés dans les trois mois à la souscription au capital d’une petite entreprise, à la rénovation énergétique ou à la construction de la résidence principale sont exonérés de droits de mutation dans la limite de 100 000 €.

1. L’article 19 de la troisième loi de finances rectificative pour 2020 institue une exonération de droits de mutation à titre gratuit , dans la limite de 100 000 €, en faveur des dons de sommes d’argent consentis entre le 15 juillet 2020 et le 30 juin 2021 au profit d’un descendant ou, à défaut de descendance, de neveux ou nièces lorsque ces sommes sont affectées dans les trois mois à la souscription au capital d’une petite entreprise européenne , à des travaux de rénovation énergétique ou à la construction de la résidence principale du donataire .

Cette mesure est codifiée à l’article 790 A bis du CGI.

Le présent article procède par aménagement de l’article 790 A bis du CGI dont le dispositif était périmé depuis 2013. Cet article prévoyait une exonération de droits de donation, dans la limite de 30 000 €, sur les dons en numéraire consentis, entre 2006 et 2010, à un descendant ou, à défaut de descendance, à un neveu ou une nièce lorsque ces dons étaient affectés dans les deux ans à la souscription au capital initial d’une PME communautaire ou à l’acquisition de biens affectés à l’exploitation d’une entreprise individuelle.

 

Champ d’application

2. L’exonération de droits est applicable aux seuls dons de sommes d’argent réalisés en pleine propriété . Ils peuvent être réalisés par chèque, par virement, par mandat ou par remise d’espèces.

3. Le dispositif est réservé aux dons en numéraire effectués au profit d’un enfant , d’un petit-enfant , ou d’un arrière-petit-enfant . Les personnes n’ayant pas d’enfant, de petit-enfant ou d’arrière petit-enfant peuvent consentir des dons au profit de leurs neveux ou nièces .

Ainsi que l’a précisé l’administration pour l’application de l’exonération des dons familiaux en espèces prévue à l’article 790 G du CGI, les neveux et nièces s’entendent des enfants des frères et soeurs du donateur à l’exclusion, par voie de conséquence, de ceux des frères et soeurs du conjoint du donateur (BOI-ENR-DMTG-20-20-20 no 160). S’il est prélevé sur la communauté des époux, le don est considéré comme consenti pour sa totalité par l’oncle ou la tante pour son compte personnel sous réserve que son conjoint n’intervienne pas comme codonateur (BOI-ENR-DMTG-20- 20-20 no 180).

4. Aucune limite d’âge n’est fixée pour le donateur.

 

Conditions d’application

5. Les sommes reçues par le donataire doivent être affectées dans les trois mois suivant le transfert :

– soit à la souscription au capital d’une petite entreprise au sens de la réglementation européenne ;

– soit à des travaux de rénovation énergétique dans sa résidence principale ;

– soit à la construction de sa résidence principale.

6. Toutefois, les versements effectués par le donataire au titre de souscriptions ou de dépenses donnant lieu à certains autres avantages fiscaux ne peuvent pas bénéficier de l’exonération. Sur cette règle de non-cumul, voir no 23 .

 A noter : Dans sa version initiale adoptée par l’Assemblée nationale, le dispositif était d’application plus large : il était proposé d’exonérer dans la limite de 100 000 € les dons de sommes d’argent affectées à la création ou au développement d’une PME dirigée par le bénéficiaire du don. Le don pouvait être consenti à la famille ou à un tiers.
Le texte tel qu’il résulte des travaux de la commission mixte paritaire a été complètement réécrit afin de rendre le dispositif compatible avec les règles européennes prévues en matière d’aides d’État et de limiter les risques d’abus.

 

Souscription au capital d’une petite entreprise européenne

7. Les sommes données peuvent être affectées par le donataire à la souscription au capital initial ou aux augmentations de capital de petites entreprises européennes.

La définition des « petites entreprises » figure à l’annexe I au règlement UE/651/2014 de la Commission du 17 juin 2014 déclarant certaines catégories d’aides compatibles avec le marché intérieur en application des articles 107 et 108 du TFUE.

Relèvent de cette catégorie les entreprises qui ont moins de 50 salariés  et dont le chiffre d’affaires annuel ou le chiffre total du bilan annuel n’excède pas 10 millions d’euros .

8. Lorsque les sommes données sont affectées à la souscription au capital de petites entreprises européennes, l’exonération de droits s’applique sous réserve que la société remplisse certaines conditions ( no 10 ) et que le donataire y exerce son activité professionnelle principale ou, si elle est soumise à l’impôt sur les sociétés, des fonctions de direction ( nos 11 s. ).

9. En outre, le bénéfice de l’exonération est subordonné au respect de la réglementation européenne prévue à l’article 22 du règlement UE/651/2014 de la Commission du 17 juin 2014 relatif aux aides en faveur des « jeunes pousses ».

 

Petites entreprises européennes visées

10. La petite entreprise européenne doit remplir les conditions suivantes :

  • - avoir son siège de direction effective dans un État membre de l’Union européenne ou dans un autre État partie à l’accord sur l’Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention d’assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales (Islande, Norvège et Liechtenstein) ;
  • - ne pas être cotée sur un marché réglementé ou sur un système multilatéral de négociation français ou étranger au sens des articles L 421-1 ou L 424-1 du Code monétaire et financier, sauf s’il s’agit d’un système multilatéral de négociation où la majorité des instruments négociés sont émis par des PME au sens européen ;
  • - exercer exclusivement une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale. Sont toutefois exclues les activités de gestion de patrimoine mobilier, les activités financières, les activités immobilières, les activités de construction d’immeubles en vue de leur vente ou de leur location ainsi que les activités procurant des revenus garantis en raison de l’existence d’un tarif réglementé de rachat de la production ou bénéficiant d’un contrat offrant un complément de rémunération défini à l’article L 314-18 du Code de l’énergie ;
  • - exercer son activité depuis moins de cinq ans ;
  • - ne pas avoir encore distribué de bénéfices ;
  • - ne pas être issue d’une concentration .

De plus, ses actifs ne doivent pas être constitués de façon prépondérante de métaux précieux, d’oeuvres d’art, d’objets de collection, d’antiquités, de chevaux de course ou de concours ou, sauf si l’objet même de son activité consiste en leur consommation ou en leur vente au détail, de vins ou d’alcools.

 

Exercice d’une activité professionnelle principale ou de fonctions de direction

11. Le donataire doit exercer dans la société, pendant une durée minimale de trois ans à compter de la souscription , son activité professionnelle principale ou, si la société est soumise à l’impôt sur les sociétés, l’une des fonctions de direction telles que définies en matière d’impôt sur la fortune immobilière.

12. La notion d’activité professionnelle exercée à titre principal s’entend généralement de celle qui procure à celui qui l’exerce le moyen de satisfaire aux besoins de l’existence. Cette profession doit être effectivement exercée, ce qui suppose l’accomplissement d’actes précis et de diligences réelles.

13. Les fonctions de direction exercées sont celles limitativement énumérées à l’article 975, III-1-1o du CGI en matière d’IFI. Il s’agit :

– dans les SARL : des gérants de droit nommés conformément aux statuts ;

– dans les sociétés anonymes (SA) : du président du conseil d’administration, du directeur général, du président du conseil de surveillance ou des membres du directoire. Ces fonctions sont également celles qui peuvent être exercées dans les sociétés par actions simplifiées (SAS), à condition que l’étendue des fonctions soit, conformément aux statuts de la société, au moins équivalente à celle des fonctions exercées par les dirigeants de SA ;

– dans les sociétés en commandite par actions (SCA) : les gérants commandités et, selon la Cour de cassation, le président du conseil de surveillance (Cass. com. 11-10-2005 no 04-13.063 FS-PBIR : RJF 1/06 no 99 ) ;

– dans les sociétés de personnes soumises sur option à l’impôt sur les sociétés (sociétés en nom collectif, en commandite simple, sociétés civiles, sociétés en participation, etc.) : chacun des associés en nom (dans la mesure où il exerce des fonctions dans les conditions exposées ci-après).

Les fonctions de direction doivent être effectivement  et personnellement exercées. Elles doivent donner lieu à une rémunération normale au regard des rémunérations de même type versées au titre de fonctions analogues dans l’entreprise ou dans les entreprises similaires établies en France.

Cette rémunération doit également représenter plus de la moitié des revenus professionnels à raison desquels le donataire est soumis à l’impôt sur le revenu dans la catégorie des traitements et salaires, des bénéfices industriels et commerciaux (BIC), des bénéfices agricoles (BA), des bénéfices non commerciaux (BNC) et des revenus des gérants et associés mentionnés à l’article 62 du CGI. En revanche, les revenus qui ne proviennent pas d’une activité professionnelle (notamment revenus de capitaux mobiliers, plus-values, revenus fonciers, pensions et rentes viagères) ne sont donc pas retenus.

 

Travaux de rénovation énergétique

14. Les sommes données peuvent également être affectées à des travaux et dépenses de rénovation énergétiques éligibles à la prime de transition énergétique (versée par l’Agence nationale de l’Habitat) et réalisés dans la résidence principale du donataire (voir FR 2/20 inf. 15 nos 2 s. ). Le donataire doit être propriétaire de sa résidence principale dans laquelle les travaux sont réalisés.

Construction de la résidence principale du donataire

15. Le donataire peut aussi affecter les sommes reçues à la construction de sa résidence principale. Elles ne peuvent pas , en revanche, servir à l’acquisition de la résidence principale.

On rappelle que l’habitation principale s’entend, d’une manière générale, du logement où résident habituellement et effectivement les membres du foyer fiscal et où se situe le centre de leurs intérêts professionnels et matériels. Lorsque le ou les membres du foyer fiscal exercent une profession qui les oblige à de fréquents déplacements, l’habitation principale s’entend du logement où la famille réside en permanence.

 

Portée de l’exonération

16. Les dons effectués dans les conditions ci-dessus sont exonérés dans la limite de 100 000 € sous réserve que leur versement intervienne entre le 15 juillet 2020 et le 30 juin 2021 .

Montant de l’exonération

17. L’exonération de droits de mutation à titre gratuit est limitée à la transmission d’une somme d’argent d’un montant de 100 000 € .

18. Ce plafond s’applique aux donations, quel que soit leur nombre, consenties par un même donateur . Le donateur peut effectuer, au cours de la période allant du 15 juillet 2020 au 30 juin 2021, plusieurs dons à des donataires différents à condition que le montant global de ses dons n’excède pas 100 000 €.

19. En revanche, un même donataire peut recevoir en franchise de droits (sous réserve de respecter les conditions de remploi des sommes), au cours de la période, plusieurs dons de 100 000 € de donateurs différents.

 Exemple  —————————————————————————————————————

Un enfant peut recevoir en franchise de droits de ses deux parents et de ses deux grands-parents des dons pour un montant cumulé de 400 000 €. Toutefois, dans ce cas, les donateurs (parents et grands-parents) ne pourront pas bénéficier de l’exonération pour d’autres dons à leurs autres enfants ou petits-enfants.

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Cumul avec les dons familiaux en espèces

20. À défaut de précision dans le texte, la présente exonération de droits se cumule avec celle applicable de façon pérenne aux dons familiaux en espèces (dans la limite de 31 865 €) prévue à l’article 790 G du CGI (sous réserve que le donateur ait moins de quatre-vingts ans et que le donataire soit majeur ou mineur émancipé).

Cumul avec les abattements de droit commun

Bien que le texte n’apporte aucune précision à ce sujet, dans l’hypothèse où le don dépasse le montant de l’exonération , les droits de mutation à titre gratuit sont liquidés (au-delà du montant de 100 000 €) dans les conditions de droit commun et en appliquant, le cas échéant, les abattements personnels (de 100 000 € sur la part de chacun des enfants, de 31 865 € sur la part de chacun des petits-enfants, de 5 310 € sur la part de chacun des arrière-petits-enfants et de 7 967 € sur la part de chaque neveu et nièce).

 

Donations successives

21. L’article 790 A bis du CGI tel que modifié par la présente mesure ne contient aucune précision quant à la non-application de la règle fiscale du rapport des donations antérieures prévu par l’article 784 du CGI. Mais le principe même de l’exonération s’oppose à l’application de cette règle.

Ainsi, un donataire, ayant déjà reçu d’un même donateur une autre donation dans la limite de l’abattement de droit commun, peut bénéficier de l’exonération sur le don en numéraire, quelle que soit la date de la première donation, y compris si elle remonte à moins de quinze ans.

Quant au don en numéraire effectué dans le cadre du présent dispositif, il ne sera pas pris en compte pour la liquidation des droits dus à raison des mutations à titre gratuit consenties postérieurement entre les mêmes personnes.

 

Combinaison avec d’autres avantages fiscaux

22. Le présent article prévoit expressément que l’exonération ne s’applique pas aux versements effectués par le donataire au titre de souscriptions qui ont déjà ouvert droit aux réductions d’impôt sur le revenu suivantes :

– réductions d’impôt sur le revenu au titre des investissements outre-mer (travaux de réhabilitation et de confortation de logements anciens, investissements productifs outre-mer des entreprises ou dans des logements locatifs sociaux) prévues aux articles 199 undecies A, 199 undecies B et 199 undecies C du CGI ;

– réduction d’impôt au titre de la souscription au capital de PME (réduction d’impôt « Madelin ») visée à l’article 199 terdecies-0 A du CGI ;

– réduction d’impôt au titre de la souscription en numéraire au capital d’une société foncière solidaire prévue à l’article 199 terdecies-0 AB du CGI ;

– réduction d’impôt sur le revenu au titre des intérêts d’emprunts contractés pour la reprise d’une PME prévue à l’article 199 terdecies-0 B du CGI.

23. L’exonération ne s’applique pas non plus aux dépenses au titre desquelles le donataire a bénéficié :

– du crédit d’impôt au titre de l’emploi d’un salarié au domicile prévu à l’article 199 sexdecies du CGI ou du crédit d’impôt au titre des dépenses de transition énergétique prévu à l’article 200 quater du CGI ;

– d’une déduction de charges pour la détermination de ses revenus catégoriels ;

– ou de la prime de transition énergétique (versée par l’Agence nationale de l’Habitat) prévue à l’article 15, II de la loi 2019-1479 du 28 décembre 2019.

 

Obligations déclaratives

24. L’exonération est susceptible de s’appliquer, que la donation soit réalisée par acte notarié ou sous seing privé , et même en l’absence d’acte, les dons devant dans ce dernier cas faire l’objet d’une déclaration de dons manuels sur le formulaire no 2735.

Conformément aux règles de droit commun, les dons constatés par un acte doivent être enregistrés dans le mois de leur date.

La déclaration de dons manuels doit être déposée dans le mois qui suit la date du don au service des impôts du domicile du donataire.

25. Dans tous les cas, le donataire qui revendique le bénéfice de l’exonération doit être en mesure de justifier auprès de l’administration fiscale, par tout mode de preuve compatible avec la procédure écrite, que les conditions d’éligibilité de l’exonération sont remplies.

 

Remise en cause de l’exonération

26. L’exonération est remise en cause en cas de non-respect des conditions .

Il en va ainsi notamment lorsque les sommes données n’ont pas été affectées par le donataire dans le délai de douze mois à la souscription au capital d’une petite entreprise au sens de la réglementation européenne, à des travaux de rénovation énergétique dans sa résidence principale ou à la construction de sa résidence principale.

27. La remise en cause entraîne l’exigibilité des droits de mutation à titre gratuit dont la donation a été dispensée, assortis de l’intérêt de retard prévu à l’article 1727 du CGI.

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