Nullité de la vente pour excès de pouvoir du gérant de la SCI
12/12/2023
Dans le cadre d’un conflit entre les associés gérants d’une société civile immobilière (SCI), l’un reproche à l’autre d’avoir vendu seul des immeubles appartenant à leur société commune au profit d’une société tierce dans laquelle il a des intérêts. La cour d’appel de Bordeaux annule la vente en retenant que l’objet social de la société est « l’acquisition, la propriété, l’administration, l’exploitation de tous biens […] ainsi que toutes opérations juridiques, administratives, financières et de gestion… », de sorte que la décision de vendre n’entrait pas dans son objet social et excédait les pouvoirs du gérant. Le cogérant fautif défend que l’objet social d’une SCI comprenant toutes opérations immobilières civiles se rattachant à la propriété de l’immeuble implique le droit d’en disposer, sauf à ce que les statuts excluent expressément de leur objet la cession.
La Cour de cassation rejette son pourvoi. L’objet social ne comportait pas la vente des biens immobiliers. La cession des immeubles excédait les pouvoirs du gérant, donc la décision de vendre ne pouvait être prise qu’à l’unanimité des associés.
À noter
Le gérant d’une SCI ne peut engager la société à l’égard des tiers, sans l’accord préalable des associés, que dans le périmètre de son objet social. L’étendue de ses pouvoirs peut être incertaine si l’objet social est large. Déjà jugé que la vente excède les pouvoirs du gérant quand l’objet social de la société est « la propriété, la possession, la jouissance, l’administration, l’aménagement, la transformation et l’exploitation par bail, location ou autrement des terrains et immeubles » (Cass. 3e civ. 5‑11‑2020 n° 19‑21.214), ou « l’acquisition, la propriété, l’administration, la mise en location, la gestion et l’exploitation de tous immeubles… et généralement toutes opérations immobilières se rattachant directement ou indirectement à cet objet et toutes opérations immobilières quelconques concernant tous autres immeubles » (Cass. 3e civ. 6‑9‑2011 n° 10‑21.815). Dans ce dernier arrêt, les juges avaient également relevé que la vente d’immeuble n’était pas expressément prévue dans l’objet social et qu’elle nécessitait l’accord préalable des associés.
Pour rappel, le rédacteur doit vérifier que l’acte est conforme à l’objet social de la société, à défaut les associés sont fondés à rechercher sa responsabilité pour ne pas avoir rappelé au gérant son obligation de respecter les dispositions statutaires (Cass. 1e civ. 27‑4‑1978). En cas de doute, il est préférable de requérir une décision collective des associés à la majorité requise pour modifier les statuts.
Cass. 3e civ. 23‑11‑2023 n° 22‑17.475.
© Lefebvre Dalloz